Dans le cadre de la 26Eme Edition du Festival de la Fiction (du 10 au 15 septembre 2024) à La Rochelle, j’ai eu l’honneur ce jeudi d’échanger avec la Maîtresse de Cérémonies, Antonia de Rendinger, humoriste et comédienne française.
Comment allez-vous, Antonia, à J+2 de cette Première en tant que Maîtresse (de Cérémonies) ?
Antonia de Rendinger : Je vais très bien. C’est extrêmement déstabilisant parce que je ne m’attendais pas à rencontrer un tel succès avec ma prestation. Je reçois plein de compliments. En cela, j’espère que le public ne place pas trop d’attente dans la clôture. [Rires.] Il faut que j’arrive à maintenir cet effet « waouh » ! Et, en fait, c’est un peu piégeux. Maintenant je suis assez sereine. En effet, j’appréhendais énormément que le ton que j’ai, sur ce type d’événement tombe à côté. Là, je suis contente parce que je vois que j’étais à la bonne place. C’est rassurant.
« You’ve got a job ! »
Comment avez-vous appris la nouvelle ? Et pris la nouvelle ? D’autant que Mathieu Madénian était – il semblerait – bien installé dans ce rôle-là, depuis quelques années.
Antonia de Rendinger: Dorothée Grosjean, mon agente, faisait un peu de lobbying auprès du Festival. Festival dont elle est fidèle. De mon côté, je savais qu’elle travaillait en ce sens-là et, de son côté, elle savait qu’éventuellement, le Festival souhaitait cette année apporter un vent nouveau à la présentation des cérémonies. Un renouveau. (…) Quand j’ai reçu un sms de mon agente me disant : « You’ve got a job ! », j’ai poussé un hurlement de joie. Suite à ça, j’ai commencé à avoir des légers problèmes digestifs jusqu’à l’ouverture. Deux options s’offrent à moi, à ce moment-là. Soit ça passe soit je suis définitivement grillée vis-à-vis de ce milieu – milieu au sein duquel j’ai terriblement envie de travailler. Au final, il n’y a pas eu besoin de forceps ou de césarienne, l’accouchement s’est bien passé.
« Suis-je légitime ? »
Est-ce que comme nombre de professionnels ici, vous avez une relation particulière avec le Festival ? Voire avec La Rochelle ? Voire pour pousser le curseur avec la Charente-Maritime ?
Antonia de Rendinger : C’est ma première au Festival. Évidemment, je connaissais son existence. J’ai plein de copains très régulièrement qui y prennent part. Ainsi, j’avais un petit pincement de ne pas y être invitée avec les séries dans lesquelles j’ai pu jouer. Celles-ci jusqu’alors n’ont pas été retenues. Aussi, certains s’y déplacent sans être dans aucune série, mais simplement, pour faire du contact. Alors se pose pour moi, la notion de légitimité. Suis-je légitime de faire du réseautage sans rien avoir à défendre ?
Par contre la Charente-Maritime ainsi que La Rochelle, je connais bien. L’Ile de Ré est une de mes places de vacances. J’apprécie beaucoup le calme de ses habitants riches et bien élevés qui ont des enfants ne criant pas à la plage malgré le prix de la baguette à 2,50 euros. C’est Versailles Plage ! Saintes, Royan, le Vieux-Port (de La Rochelle) pour y avoir loué des bateaux sous format « Airbnb » et La Rochelle pour y avoir mes petites adresses (une bonne pizza dans une trattoria typique, un cocktail trop cher dans un joli cadre) … J’aime beaucoup La Rochelle. Et j’aime beaucoup la Charente-Maritime.
Est-ce qu’on monte et appréhende cet exercice comme un one-woman-show ?
Antonia de Rendinger : Ce sont deux exercices totalement différents. Ayant plusieurs cerveaux en un, c’est un juste dosage entre élaborer une architecture et laisser des espaces d’expression. La question de spontanéité, d’authenticité et de facto, de naturel m’importe vraiment. J’aime l’idée de laisser libre court à l’improvisation tout en respectant une structure. J’ai un conducteur. Des codes. Je ne dois pas froisser un tel ou un tel. En somme, j’oscille entre l’acceptable et l’inacceptable.
L’image marquante de cette Cérémonie est celle de ces quatre femmes au devant de la scène ; est-ce qu’on peut dire que le féminin (re)prend sa part de pouvoir ? Ou c’est purement médiatique et dans l’air du temps, de les montrer davantage.
Antonia de Rendinger : On vit en effet, dans une époque charnière. J’aspire vraiment à ce que ce ne soit plus une question. Du tout. Une question de parité, de quota, de mixité, etc.
« Les femmes ont non seulement une appétence mais une légitimité. »
Très naturellement, les femmes font appel à d’autres femmes. Cette année, la Présidente (du Festival) est une femme ; elle a fait appel à une femme en tant que Maîtresse (de Cérémonies). Sophie Revil travaille entourée de femmes. D’ailleurs, il y a aujourd’hui, jeudi, une table ronde autour des femmes dans l’audiovisuel. Les femmes ont non seulement une appétence mais une légitimité ainsi que des compétences qu’elles n’ont plus à montrer.
« L’avenir de Téva est d’exister en tant que chaîne et non, chaîne militante. »
Je travaille dans Piquantes !, l’émission de Nicole Ferroni, sur Téva. Je participe régulièrement au Téva Comedy Show. Une chaîne (de télévision) féminine faite par des femmes avec des femmes. L’avenir de Téva est je le souhaite, de ne plus exister en tant que média militant mais simplement d’exister comme chaîne.
« Éduquer dès le plus jeune âge nos enfants pour que le partage se fasse de manière équilibré. »
Parallèlement, j’ai deux filles. À juste titre, je trouve difficile de les élever dans notre climat actuel ponctué de « #metoo / #balancetonporc ». Sans parler du sentiment qu’il y ait des impunités dans l’audiovisuel concernant des comportements inadmissibles d’hommes. Je remarque que mes filles ainsi que leurs amies ont une appréhension vis à vis de l’entrée dans la sexualité. En ça, j’aspire que les femmes et les hommes marchent main dans la main pour créer une société plus harmonieuse. Ainsi qu’à un peu plus de légèreté concernant ce débat qui est aujourd’hui, très lourd.
« L’humour n’est pas l’arme des faibles. »
La lourdeur vient aussi de nous, les femmes. Il faudrait que nous amenions ce débat-là avec plus de légèreté. Moi, j’ai fait de l’humour, une arme féroce pour arriver à la femme que je suis. L’humour n’est pas l’arme des faibles. La colère voire l’hystérie desservent les femmes et nos combats.
Vous êtes toute la semaine à La Rochelle puisqu’en théorie et pratique, vous êtes aussi la Maîtresse de Cérémonie de clôture ; comment occupez-vous ces 5 jours de festival ? Est-ce que vous avez le temps de prendre part à des projections ? Allier plaisir et devoir.
Antonia de Rendinger : Quand je sors de ma chambre, je n’ai plus une minute à moi. J’essaie d’aller visionner quelques projections. L’équipe du festival m’a fait une petite sélection. En plus de celles du soir, j’essaie d’en faire une ou deux dans la journée. Cependant, je n’avais pas prévu d’être autant arrêtée dans la rue pour prendre des selfies, signer des autographes… Ne vous méprenez pas, j’adore ces moments-là ! J’adore le public ! J’adore les gens ! C’est des moments qui me mettent tellement en valeur que mon ego en est pleinement satisfait. Je prépare également des petites choses pour la clôture. [Suspens.] Et demain, vendredi, je me consacre entièrement à revoir le conducteur, placer les musiques pour la montée des marches pour chacun des lauréats, voir comment on organise avec le directeur technique les petits moments d’improvisation non écrits, etc.
Après le festival, quel est le programme d’Antonia de Rendinger ?
Antonia de Rendinger : Suite à une inondation, Emmaüs vient enlever quelques meubles de famille dans ma cave. Autrement, j’ai laissé une pause volontaire jusqu’au mois de décembre dans mon agenda. Cependant, je reprends Piquantes ! . Prochainement, je serai sur les antennes de France Bleue. J’ai laissé une pause volontaire dans mon agenda au cas où l’audiovisuel arriverait. Le fait d’avoir un calendrier de spectacles prédéfinis pouvait jusqu’alors refréner les productions. Or aujourd’hui, j’ai envie que les productions sachent qu’elles peuvent m’appeler. Que je ferais le ménage nécessaire si des choses intéressantes se profilaient. Et je l’espère.
On l’espère avec vous ! Et on vous donne rendez-vous ce samedi à 20h à La Coursive pour ladite Cérémonie de clôture.